Partager la publication "Une page blanche, une enquête policière et une scène de cinéma pour s’imprégner de l’écriture journalistique"
Agostino Pantanella, diplômé de l’Ecole Supérieure de Journalisme de Lille est également formateur dans le domaine des techniques d’expressions écrites et orales. Après une carrière dans la presse écrite et la radio, il forme au CFPJ depuis 1994. Il a notamment dirigé le Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes en tant que DGA de 2003 à 2012. Il enseigne également les techniques de la communication externe et celles des Relations Presse.
[/dt_quote][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]La page blanche n’a jamais eu la peau d’un rédacteur mais elle lui a souvent fait perdre beaucoup de temps.
Elle intimide, cette page blanche. Elle tétanise. Elle hypnotise et décourage la moindre envie d’écrire. Il suffit pourtant de savoir juste perdre un peu de temps pour en gagner. D’abord identifier les faits d’un événement et respecter scrupuleusement le contenu de celui-ci : qui, où, quand, quoi. Installer ensuite cette information dans le comment et le pourquoi de son environnement pour en dégager le message essentiel. Après ce rapide temps de préparation, il ne reste plus qu’à rédiger une histoire, tout simplement, avec un angle. Éventuellement, avec un bon angle. Cette page blanche est alors disposée à se laisser apprivoiser pour peu que les mots à son endroit demeureront simples, clairs, précis et concis. Ces mots, toujours concrets, habiteront des phrases toujours courtes et jamais sans trop de relatifs. Les verbes souvent riches, justes et adaptés, correspondront à une action spécifique. Ne pas oublier alors de jeter à la poubelle ceux qui s’invitent avec facilité dans notre écriture, par habitude : faire, mettre, dire, permettre et les auxiliaires avoir et être, pris comme des verbes. La cohabitation, fond et forme d’une information, peut enfin commencer.
Informer c’est raconter une histoire mais pas comme nous l’avons appris à l’école.
Il faut en finir avec le scolaire Introduction-Développement-Conclusion, et bien plus tard, avec l’académique Thèse-Antithèse-Synthèse. Foutaises. À jeter aux orties. Dans ces deux plans d’écriture, l’information arrive toujours très tard, à la fin. En dernier, comme les carabiniers. Informer, c’est, là-encore, une question de temps. Le plan de la pyramide inversée aide ainsi le rédacteur à gagner du temps pour donner à voir, une information le plus tôt possible au tout début de son article. Par analogie, laissons Agatha Christie emmener son lecteur jusqu’à la page 248, la dernière page, d’un de ses romans policiers pour qu’il découvre le nom de l’assassin. C’est très bien pour se détendre quand le fana de polar s’accorde un peu de temps. Mais de grâce, en termes d’informations, afin de ne pas perdre un temps précieux parce qu’il est rare dans le journalisme et la communication, préférons-lui un bon inspecteur Colombo. Dès le début, cette série télévisée nous montre qui, où, quand, quoi, comment, pourquoi le meurtre a été commis. C’est ensuite à Colombo de nous raconter l’histoire.
Un peintre installe son chevalet pour dessiner douze croquis d’un château.
Cette scène se déroule dans un film britannique des années 80 : « Meurtre dans un jardin anglais ». L’artiste commence à poser son à-plat avant d’entamer son œuvre. Comme tout créateur, tel le sculpteur, l’artiste part d’une idée, d’un thème, d’un bloc de marbre, d’une toile … blanche. Au bout de sa technique, la maîtrise de ses coups de crayons, ses agencements de couleurs. Quand le tableau est presque achevé, après de longues heures de travail, ce peintre dans ce jardin anglais dessinerait presque « en direct », lors des ultimes finitions, jusque dans les moindres détails, un meurtre à travers l’une des fenêtres du château. Un couteau levé derrière les carreaux vient se ficher dans le dos de la victime. En terme cinématographique, le peintre est parti du général pour arriver au particulier : de l’à-plat au meurtre. Il vient d’effectuer un zoom avant. En matière d’information, le rédacteur, le journaliste ou le communicant réalise l’inverse. Il présente d’abord le particulier pour aller au général, le meurtre avant le contexte. Il effectue alors un zoom arrière. Cette analogie définit au mieux l’écriture journalistique.[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]
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