La Folie Podcast

Documentaires, séries, fictions. De trois, dix, cinquante minutes. Sur la sexualité, la nourriture, le féminisme, les émotions… Depuis 5 ans, le format podcast explose en France. Un français sur 10 en écoute au moins une fois par semaine, soit 3,4 millions d’individus **. Une véritable frénésie qui pourrait s’apparenter à celle entourant l’apparition des radios libres, dans les années 70 ou plus récemment celle des blogs et des chaînes Youtube.

  • Qu’est-ce qu’un podcast ?

Le mot « podcast » apparaît aux Etats-Unis en 2004, après le lancement de l’Ipod d’Apple. Contraction de « IPod » et de « broadcast» (diffuser en anglais), il désigne un contenu audio disponible sur Internet, à écouter sur son ordinateur, sa tablette ou son téléphone via une application. Il peut s’agir d’émission de radio, ou d’une création sonore, réalisée et diffusée uniquement sur le Web, sans un passage par l’antenne : le podcast dit « natif ».

Le podcast n’est pas une question de contenu explique Violette Voldoire, co-fondatrice et co-rédactrice en chef de Radio Parleur, une radio 100% dédiée au podcast de reportages.

C’est en 2014 que le podcast natif commence à se populariser, avec la naissance de « Serial », de l’autre coté de l’Atlantique. Une série de plusieurs épisodes dans laquelle la journaliste américaine Sarak Koenig se penche sur le meurtre d’Hae Min Lee, en 1999. En quelques semaines, le programme a été téléchargé plus de 5 millions de fois. Un carton, qui va véritablement lancer le format podcast.

  • La liberté de création

Contrairement à la radio traditionnelle, le podcast n’est pas soumis à des contraintes d’antenne ou de ligne éditoriale. Sa mise en place est donc beaucoup plus facile, et surtout moins onéreuse que d’obtenir une fréquence FM, selon Violette Voldoire.

 

  • Accessible à tous

Le podcast, Alexandre Mognol en a fait son métier. Tombé dans la radio à l’âge de 18 ans, journaliste, reporter, il découvre ce nouveau format en 2013 et multiplie les créations. Sa marque de fabrique : les projets au long cours. Il lui aura fallu près d’un an d’enquête pour réaliser « Un Canon sur la Tempe », diffusé par Nouvelles Ecoutes. En France, ce trentenaire est l’un des rares auteurs à vivre de ses réalisations. Il estime que l’attirance du public s’explique en partie par la facilité de produire de tels contenus.

Aujourd’hui, les outils d’enregistrement se sont démocratisés. Certains enregistreurs coûtent moins de 200 euros, des logiciels de montage sont disponibles gratuitement sur Internet. Et il est possible de diffuser directement le fruit de son travail sur des plateformes, telles que Soundcloud.

  • La liberté de ton

Avec le podcast, les auteurs.trices sont libres d’aborder les sujets de leur choix, sans limite de durée et avec une grande liberté de ton. Et là réside la première raison du succès de ce format analyse Silvain Gire, le responsable d’Arte Radio, créée en 2002, pionnière du podcast natif en France.

 

  • Où je veux, quand je veux.

L’autre caractéristique du podcast, qui peut expliquer l’engouement du public, est sa disponibilité immédiate. L’auditeur.trice écoute l’œuvre de son choix, quand il/elle le souhaite, dans n’importe quel lieu, tout en ayant les mains libres pour faire autre chose. La plupart des adeptes savourent les podcasts chez eux (27%) en faisant la cuisine par exemple, ou dans les transports lors des longs trajets (21%) *, le plus souvent seuls et au casque. Le téléphone est le principal appareil d’écoute.

  • Élargir les horizons

Facile à faire, peu coûteux, plus proche du public… La formule a de quoi plaire et de nouveaux acteurs, tels que les grands titres de la presse écrite, ont décidé de prendre le train en marche. En plus de la version print et web des articles, Le Monde, l’Equipe, Ouest-France ou encore le Parisien et les Echos ont lancé leur propre podcast. Leur espoir : répéter en France le succès du « Daily », le podcast du New York Times, lancé en février 2017, aujourd’hui écouté en moyenne deux millions de fois par épisode.

En mai dernier est apparu Code Source, le podcast quotidien du Parisien, réalisée par une équipe de quatre personnes, rassemblées autour d’un ancien de France Info, Jules Lavie. Ce projet, c’est Pierre Chausse, le directeur adjoint des rédactions du Parisien en charge du numérique qui en a eu l’idée.

 

  • Coup de frais, coup de pub

Pour mener à bien son projet, Pierre Chausse s’est appuyé sur Binge Audio. Une société de production de podcasts, créée en 2015, dont le groupe Le Parisien – Les Echos détient 33% des parts. Elle tire environ 80% de ses revenus de la production de contenus pour d’autres médias, mais aussi pour des marques. Ces dernières y voient l’occasion de renouveler leur image et d’atteindre le consommateur au creux de l’oreille. Si Guerlain a été la première maison de beauté à lancer son podcast, en 2018, d’autres lui ont rapidement emboîté le pas : Chanel, la Maison de Champagne Veuve Clicquot, ou encore la marque de joaillerie Gemmyo, et son podcast « Chalalove ». « Passer par le podcast permet aux marques d’aborder des sujets complexes avec davantage de nuances que lors d’une campagne d’affichage ou un spot TV car elles disposent de davantage de temps, explique Joël Ronez, président et co-fondateur de Binge Audio. L’écoute moyenne d’un programme est de 80%, soit une vingtaine de minutes. Le message a donc plus d’impact. » Aujourd’hui en France, le marché publicitaire du podcast représenterait entre 500.000 et 600.000 euros.

  • Un nouvel eldorado

À l’heure actuelle, le modèle économique du podcast en est encore à ses balbutiements. Il n’existe pas véritablement de grille de tarifs et la question de la rentabilité de ces nouveaux contenus est loin d’être réglée. Certaines plateformes ont ainsi dû jeter l’éponge, faute de financements. C’est le cas de BoxSons, fondée en 2017 par Pascale Clark et Candice Marchal, contrainte de stopper toute activité au printemps 2019 malgré le soutien d’un millier d’abonnés.

D’autres voient au contraire dans le podcast un nouveau marché à conquérir, une véritable industrie, au même titre que celle de la vidéo ou de la musique.

Ainsi, l’ancien PDG de Radio France Matthieu Gallet a lancé en juin dernier Majelan. Une plateforme d’écoute avec un accès payant. Une sorte de « Netflix du podcast », proposant aux internautes des contenus exclusifs. La plateforme Sybel, lancée en mai 2019 par Virginie Maire, et qui propose des fictions, des documentaires et des créations originales, revendique déjà plus de 500.000 utilisateurs actifs.

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* Sondage Opinion Way de mars 2017.

** Etude Havas Paris et l’Institut CSA, publiée en octobre 2019, à l’occasion de la seconde édition du Paris Podcast Festival.

Infos pratiques :

Où écouter des podcats natifs (entre autres)

Les podcasts à écouter d’urgence : https://www.parispodcastfestival.com/palmares-2019

Article rédigé par Louise REGENT / JRI – pigiste chez TV Tours Val de Loire