Suite de notre série de rentrée qui s'interroge sur une question centrale au CFPJ : ce qui qu'une histoire mérite d'être lue. Dans ce post, nous allons aborder la question cruciale de la progression du récit. Une bonne histoire est affaire de dynamique, de vie, de mouvement et donc de progression. Ce qui n'est pas toujours simple (et pourtant possible) à l'heure des productions ultra-courtes.

Ecrire une bonne histoire : épisode 2, faire progresser le récit

Suite de notre série de rentrée qui s’interroge sur une question centrale au CFPJ : qu’est-ce qui fait une bonne histoire ? Dans ce post, nous allons aborder la question cruciale de la progression du récit. Une bonne histoire est affaire de dynamique, de vie, de mouvement et donc de progression. Ce qui n’est pas toujours simple (et pourtant possible) à l’heure des productions ultra-courtes.

Une bonne histoire c’est une progression, une évolution. Presque comme si le récit était fait d’une matière vivante. Un héros apathique, aboulique, inactif… ne ferait sans doute pas un personnage passionnant. Du reste, on éprouverait des difficultés fort légitimes à écrire sur rien. On ne peut écrire que sur une matière qui va bouger, évoluer dans le temps ou autour de laquelle une vie va s’organiser.

La force d’une histoire se situe précisément ici : dans l’idée de progression. A titre personnel, en tant que journaliste, j’ai souvent eu du mal à rédiger mes reportages justement parce qu’ils ne proposaient pas de progression. Chaque élément nouveau doit, justement, apporter un nouvel éclairage sur le sujet. Prêtez attention aux reportages de presse écrite : chaque nouvelle citation va permettre soit d’approfondir une problématique soit d’en illustrer une nouvelle et d’aller un peu plus loin que le paragraphe précédent.

Cela veut dire une première chose : quand vous réunissez sous vos yeux votre matière, vos interviews, vos chiffres, vos citations, vos informations, vos éléments centraux, il faut les trier et les hiérarchiser. Hiérarchiser pour construire une progression. Libre à vous de démarrer par la fin. Mais vous devrez construire néanmoins une progression. On voit cela dans de nombreux romans et films : une scène d’introduction qui raconte une partie du dénouement de l’intrigue, voire qui raconte sa fin ; puis un retour en arrière pour reprendre depuis le début le récit qui nous occupe. C’est un peu de cette manière là que nombre de tragédies antiques sont façonnées : on sait – souvent par l’entremise d’un augure, comment l’histoire va se terminer et on assiste à l’alignement malheureux des planètes qui va mener à la tragédie.

Comment organiser ces parties ? En choisissant une progression qui va coller au propos. Exemple avec la série de livres Harry Potter qui suit l’apprentissage d’un jeune sorcier, année scolaire après année scolaire. Chaque tome met en scène le héros, d’année en année. Et le lecteur progresse avec lui, apprend avec lui sur le monde, les intrigues, les personnages, les enjeux dramatiques.

On pourrait, par ailleurs, tout à fait imaginer un récit qui pourrait proposer une progression renversée : imaginons un récit sur l’empire romain qui partirait de sa dislocation pour remonter vers son âge d’or. C’est ici une progression plus rare mais que l’on peut retrouver dans de nombreux récit (c’est le cas dans certaines œuvres comme le film Memento dans une certaine mesure, dans le roman Counter-clock World de Philip K. Dick mais pensez aussi, plus prosaïquement à un CV).

Mais, fondamentalement, pourquoi un bon récit implique-t-il une progression ? Je pose cette question que je laisserai ouverte car il appartient à chacun d’y apporter une réponse. Pour moi, l’idée de progression implique l’idée de vie, de mouvement et au-delà, la progression pose la condition d’une existence. Tout ce qui existe a un rapport au mouvement. Un rapport concret, métaphysique, ontologique, etc. Et ce qui ne se meut pas ou n’est mu par rien ne peut pas être raconté. L’idée de progression implique du mouvement et donc, en toute logique, de la surprise, de l’inattendu, de l’action. La progression, c’est ce qui va briser la routine, l’habitude, l’ennui et va donc relancer l’intérêt du lecteur ou de la lectrice.

Cette idée de progression on la retrouve aussi dans la structure même de l’écrit. Varier les rythmes des phrases, leurs longueurs, est un enjeu essentiel pour raviver la flamme de l’attention. Même lorsque l’on écrit un rapport ou une synthèse, cette idée de progression est importante. Faire progresser le récit, le garnir de moments plus denses et plus vifs puis de temps plus faibles, va faciliter la lecture. Imaginez qu’en écrivant, vous soufflez sur des braises. Parfois, il vous faudra souffler fort pour raviver le feu qui couve ; à d’autres moments, vous reprendrez votre souffle.

Une bonne histoire, en plus d’être sous-tendue par une unité, une cohérence, garantirait donc une progression. Qu’il s’agisse d’un article journalistique, d’un roman, d’une série, d’un rapport ou d’une synthèse. Si vous voulez être lu-e, vous devez vous astreindre à garantir une progression, un mouvement global à votre récit. Ulysse n’a pas vécu l’Odyssée en restant vissé à Ithaque (peut-être aurait-il dû, me direz-vous !). Et c’est bien là l’idée maîtresse qui sous-tend une bonne histoire : elle progresse, elle vit. une bonne histoire est sorte de matière vivante qui nait, vit et connaît une fin. Et c’est dans la progression du récit dans la forme comme dans le fond qu’une histoire se démarquera.

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