Les médias traditionnels sont confrontés simultanément à deux défis : une baisse de la confiance du public envers le journalisme et une concurrence de plus en plus puissante des réseaux sociaux.

Les réseaux sociaux désormais incontournables pour s’informer

Les médias traditionnels vont-ils disparaitre ? A la lecture d’un immense rapport du Reuters Institute, cette question, volontairement provocatrice, n’est pas pour autant sans intérêt. Car la prépondérance des réseaux sociaux et de nouvelles sources d’informations viennent concurrencer de manière parfois extrêmement puissante les médias traditionnels.

Le Reuters Institute vient de publier une vaste enquête réalisée auprès de près de 100 000 personnes dans 46 pays du monde entier. Cette enquête permet de dégager les grandes tendances en matière d’info numérique. Qui consomme quoi et comment ?

Applications et sites d’info de plus en plus essentiels

Le Reuters Institute note une évolution colossale dans un domaine : 22% des sondés disent préférer les applications ou les sites web pour s’informer. C’est 10 points de plus qu’en 2018. A travers le monde, Facebook reste le réseau social le plus utilisé pour consulter les informations mais « son influence sur le journalisme décline » expliquer le rapport. En partie en raison de la bonne santé de Youtube et surtout de l’explosion de TikTok. Une croissance particulièrement forte en Afrique, dans la région Asie-Pacifique et en Amérique Latine.

Et, on l’imagine aisément, la télévision et les médias traditionnels vivent la trajectoire inverse. En France, la télévision reste la première source d’info mais le plébiscite n’existe plus (84% des français considéraient la TV comme le premier moyen d’information en 2013, c’est désormais 20 points de moins en 2023). La France reste donc une exception avec une télé nationale qui décline mais reste solide (une tendance similaire s’observe au Japon).

Autre tendance qui mérite d’être soulignée, la France est toujours à la traine en matière de presse en ligne. Seulement 11% des français ont payé pour de l’info en ligne en 2022, bien loin des 39% de Norvégiens, 33% de Suédois ou même des 21% d’américains.

Journalistes ou influenceurs ?

Autre tendance très forte, visible en France avec des personnalités comme Hugo Décrypte : quand il s’agit de l’info, les utilisateurs portent davantage d’attention aux célébrités, aux influenceurs et producteurs de contenus, plutôt que des journalistes. 30% des interrogés voient par ailleurs d’un bon œil le fait que des algorithmes sélectionnent pour eux les infos importantes soit 6 points de plus que lors de la même étude en 2016.

Dans la même perspective, l’intérêt pour l’info continue de décliner un peu partout. La guerre en Ukraine et, avant cela, la pandémie de Covid, ont fortement contribuer à un détournement de l’information. Aujourd’hui, on ne veut plus entendre des mauvaises nouvelles. La tendance est visible partout. En France, la proportion de personnes affirmant être très ou extrêmement intéressées par les infos est passée de 59% en 2015 à 36% en 2023.

Une confiance en baisse, encore et toujours

Et au-delà de l’intérêt pour l’info, il y a cette question de confiance. Et là encore, l’étude est sans appel. La confiance envers les médias continue de décliner et elle est même particulièrement basse en France. La France, où seulement 30% des interrogés disent avoir confiance en la plupart des infos la plupart du temps.

Dernier enseignement recensé ici : la force des réseaux sociaux. On l’a vu, les réseaux sociaux sont de plus en plus utilisés pour consommer du news. Mais, surtout, ils sont désormais la première porte d’entrée vers l’info, devant les sites d’info eux-mêmes. Cette tendance lourde n’est pas visible partout. Dans les pays du Nord de l’Europe par exemple, les utilisateurs privilégient largement les sites des médias. C’est très exactement l’inverse en Asie et en Amérique du Sud. Cela semble lié en partie à la culture de l’info selon les pays. Dans des régions comme le Nord de l’Europe qui ont très tôt compris les enjeux de l’info payante en ligne et qui ont structuré leurs production sur le net très tôt, on note une moindre prépondérance des réseaux sociaux dans l’accès à l’information.